Rencontre avec un antifa en 2012

Il y a bientôt dix ans, (c’était en 2012) je venais de rejoindre l’équipe d’Alain Soral et commençais seulement, après 30 ans de mise sous l’étouffoir par les médias, à rencontrer mon public. Grâce à la visibilité que le site d’Égalité et Réconciliation m’offrait, je commençais à sillonner la France et à proposer à un public passionné le fruit de mes recherches.

C’est ainsi que j’ai eu le bonheur de rencontrer Étienne Chouard. Certes, les sujets de désaccord ne manquaient pas entre nous, mais nous avions, l’un comme l’autre un désir sincère de dénoncer les mensonges dont notre éducation nous avait abreuvés. Imprégné de valeurs de gauche que j’avais toutes rejetées après les avoir défendues, Étienne découvrait, avec stupeur, l’imposture des Lumières auxquelles il avait cru. Nos échanges étaient si passionnés qu’il nous vint un jour l’idée de les faire partager au public par une conférence commune. La section roubaisienne d’E&R nous en donna l’occasion.

La promotion de cette conférence fut magnifiquement faite, un petit montage vidéo découvrant nos deux visages et nos interrogations circula sur la Toile, et les inscriptions commencèrent à pleuvoir par dizaines. Nous espérions un moment magnifique.

Voir ici : https://www.dailymotion.com/video/xvbxao

Cette conférence faillit ne jamais avoir lieu. Étienne, d’une voix blanche, m’annonça un jour qu’il recevait des menaces de mort.

Ce n’était pas la première fois, mais ça s’accélérait. Plus mort que vif, il précisa qu’on en était à lui promettre de lui hacher le visage à coups de pelle coupante…

Certes, le crime d’Étienne était particulièrement grave : en s’affichant avec moi il montrait qu’il frayait avec des fascistes, des antisémites, des nazis, des cathos, bref, avec des monstres et il allait avoir affaire à de brillants chevaliers blancs de la lutte contre ces horreurs : des antifas.

Antifa, contraction d’Antifasciste.

Étienne avait compris ce qu’il fallait penser des accusations me concernant mais, avec raison, il avait peur.

Alertée, la section de Roubaix fit tout ce qu’elle put pour le rassurer : un service d’ordre en bonne et due forme assurerait notre protection, on le supplia de ne pas renoncer à cette conférence dont on attendait beaucoup.

Ce fut impressionnant. Dans un grand hall glacial (nous fûmes obligés de garder nos manteaux alors que nous étions assis sous la clim qui produisait un vrombissement calamiteux à la bande-son de la future vidéo), nous fîmes face à des centaines d’auditeurs chaleureux, passionnés, attentifs. Quatre heures, la conférence dura près de quatre heures (3h 50, précisément) et personne ne se leva pour aller voir ailleurs.

Quand elle fut terminée, les militants d’E&R apportèrent une pile de mes livres pour les offrir à la vente et me les faire dédicacer et Étienne, qui n’en avait pas à proposer, resta près de moi à contempler, amusé, la longue file des acheteurs.

C’est un des moments les plus émouvants de ce genre d’événement : la rencontre avec mes lecteurs ou mes futurs lecteurs. Chacun dit un mot gentil, partage son émotion, ses découvertes, dit sa reconnaissance, remercie, ce sont de véritables déclarations d’amour que je reçois de ce public passionné qui paye pour apprendre et qui dit merci.

Quand ce fut son tour, un grand jeune homme se pencha par-dessus la table pour me parler sans être entendu des autres.

–          Je n’ai pas de livre. Je ne suis pas venu pour ça.

J’étais tout ouïe…

–          Je suis venu pour vous casser la gueule. Quand on m’a dit qu’on ne ferait rien aujourd’hui et qu’il fallait partir, j’ai décidé de rester, pour voir. J’ai payé ma place. Je suis un antifa.

Un tout jeune homme avec une tête de tout le monde. On lui aurait donné le bon Dieu sans confession.

–          Je suis content d’être venu. J’ai compris. On nous ment. Qu’est-ce qu’on nous manipule ! Mais qu’est-ce qu’on est cons ! Mais qu‘est-ce qu’on est cons !

Mais non, jeune homme. En tout cas, pas vous. Ça je vous l’assure.

Pour voir la vidéo de 2012, publiée longtemps après :

https://www.dailymotion.com/video/x196vya

One Comments

  • Tollandophobe 17 novembre 2021 Reply

    Un programme vidéo alléchant que je vais m’empresser de regarder.

    Je suis agréablement surpris que ce jeune homme, pourtant intoxiqué de partisanisme au point d’être prêt à frapper ceux qui ne pensaient pas comme lui le faisait, ait eu assez de conscience pour se raviser. C’est une belle victoire contre le sectarisme.

    Aujourd’hui les sornettes de la « lutte contre les séparatismes » permettent à la République française de transformer un combat contre le djihadisme (lequel est financé par les alliés de cette République française) en un combat contre le camp opposé du djihadisme. C’est qu’il paraît que, pour penser bien, il faudrait n’avoir pas été dans des écoles hors contrat ni avoir étudié avec ses parents, à la maison. Seraient-ce là les voies royales vers le terrorisme ? vers le « fâchisme » ? vers le « nazisme » ?

    Les djihadistes sont pourtant largement des produits de l’école de la République, de sa presse, de sa culture, et du déracinement qu’elle promeut.

    J’ai passé quelques années de primaire dans une école catholique sous contrat et tout le reste de ma scolarité dans l’enseignement public ; cependant je suis un des « hérétiques » de cette république qui s’obsède de nos pensées et de nos cœurs.

    L’essentiel de ma famille a voté pour Mitterrand en 1981. Et j’étais anarchiste quand j’étais jeune.

    Les bâillons légaux interdisant de discuter certains sujets pratiques (la science, l’histoire…) m’ont toujours horrifié, et l’actualité m’a toujours prouvé que les méthodes auxquelles on pense en disant « fâchisme » sont celles des pires ennemis du « fâchisme ». Le grégarisme naturel qui nous pousse à ne frayer qu’avec ceux qui sont d’accord avec nous m’a toujours paru être une grande sottise n’engendrant qu’une sottise plus grande encore.

    La République française et les autres États du monde libéral issu des « Lumières » ont la prétention de ne pas censurer. Le bourrage de crâne scolaire et la martelage par une presse dont la variété n’est qu’un trompe-l’œil suffisent d’ailleurs pour la foule, et l’instinct grégaire fait le reste pour la plupart de ceux qui y résistent. Enfin pour les quelques uns qui ne bêlent pas avec le troupeau, il y a la peur : le monde des Lumières adopte le principe de Machiavel (un de ses auteurs de prédilection) selon lequel les États gagnent à se faire la réputation de la plus grande tolérance en en pratiquant l’inverse. Des milices de révolutionnaires bénévoles se chargent des basses œuvres qu’il serait par trop compromettant de faire accomplir par la police. Les actes commis sont généralement impunis ou peu punis, ce qui en soi suffit à assurer le recrutement de volontaires fanatiques. « Lorque la haine des hommes ne comporte aucun risque, leur bêtise est vite convaincue, les motifs viennent tout seuls. » (L.-F. Céline, Voyage au nout de la nuit).

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